JPB - Des facteurs éxterieurs à la table Loyola ont fait échouer l'accord

Publié le par Abertzaleen Batasuna

"Des facteurs extérieurs à la table de Loyola ont fait échouer l'accord"

15/04/2010

Clémence LABROUCHE

Imanol Murua Uria était hier à l'Université de Bayonne. Au moment des négociations de Loyola, le journaliste a suivi les différentes phases du processus. A cette époque, même s'il observe de grandes difficultés dans la résolution, il reste confiant sur la fin du conflit. Pourtant, à la mi-mai 2007, le processus échoue définitivement. Comment un processus, a priori, bien engagé, a-t-il pu ainsi avorter ? Pour tenter de répondre à ces questions, Imanol Murua Uria vient de publier Loiolako hegiak, aux éditions Elkar. Premier ouvrage sur les négociations de Loyala, l'auteur revient sur les facteurs qui ont conduit à l'échec des négociations. Phénomène extrêmement rare dans l'univers des négociations, au fil des pages, les acteurs se dévoilent.

Quand on demande à Imanol Murua Uria pourquoi il a souhaité écrire ce livre, il répond sans hésitation : «il n'y a pas encore eu de livres écrits sur ce sujet. Penser que le premier pouvait être en euskara était en soi très stimulant. Par ailleurs, l'intérêt pour moi résidait dans la dimension interactive des protagonistes».

Pour élaborer cet ouvrage, Imanol Murua Uria a en effet pris en considération les trois visions principales de ces négociations avortées : celle du PNV, du PSE-EE (parti socialiste) et enfin celle de Batasuna. Cette approche offre un livre très détaillé en faits historiques et fourni en anecdotes parfois cruciales, parfois «cocasses».

Avec une «ferme» intention

Si l'année 2006 marque l'apogée du processus de négociations de Loyola, Imanol Murua Uria insiste sur l'antériorité des démarches de rapprochement : «Le processus a vraiment démarré en 2001, dans la ferme Txillarre. C'est à cette époque que les discussions informelles ont débuté entre Arnaldo Otegi et Jésus Egiguren. Jusqu'en 2003, devant les conditions politiques de l'époque, elles restent secrètes».

Mais en 2004, avec l'arrivée du PSOE au pouvoir à Madrid, la proposition d'Anoeta de Batasuna, les négociations prennent une autre dimension. Plus largement soutenues, les discussions perdurent jusqu'à devenir le processus public connu de tous en 2006. Deux espaces de discussion sont alors élaborés : le premier entre ETA et le Gouvernement espagnol et le second entre les principaux partis politiques engagés dans le conflit.

Accord sur une esquisse

Vers la fin de l'année 2006, les négociations s'accélèrent au point que certains espèrent signer les prémisses d'un accord. Entre les mois de septembre et octobre, les principaux responsables du processus ont déjà participé aux neuf des douze réunions qui auront finalement lieu. Le 30 octobre 2006, les protagonistes se quittent avec une esquisse de propositions à faire valider par leurs camps respectifs.

Le schéma porte alors sur deux points principaux : d'une part le principe selon lequel tous les projets politiques soutenus par une majorité de la population doivent avoir l'opportunité d'être concrétisés. D'autre part, «les responsables assis à la table des négociations acceptent l'idée d'un organe institutionnel commun entre la Communauté Autonome Basque et la Communauté Forale de Navarre». L'organe est alors défini comme un organe exécutif, compétent en matière de propositions législatives.

Si tous les acteurs présents le 30 octobre semblent d'accord, des désaccords fondamentaux apparaissent à la réunion suivante, le 8 novembre 2006 : «des facteurs extérieurs à la table de négociation de Loyola ont fait échouer l'accord». Echaudée par «des compromis non remplis», la gauche abertzale veut des garanties supplémentaires que les autres parties ne sont pas prêtes d'accepter. Aussi, au cours des deux dernières réunions, si les discussions se poursuivent dans le second espace de discussion (celui des partis politiques), elles s'avèrent bloquées dans le premier, jusqu'à l'attentat de Madrid.

Une dernière tentative de négociation a alors lieu en mai 2007 sous l'influence de Tony Blair. Si Batasuna se montre favorable aux propositions émises par les interlocuteurs internationaux, le PSOE estime de son côté que les garanties ne sont pas suffisantes. Ce refus et la fin de la trêve d'ETA en mai 2007 marquent la fin de ce cycle de négociations.

Comment préparer le futur ?

D'après Imanol Murua Uria, a posteriori, un modérateur extérieur au conflit et reconnu internationalement (tel bill Clinton en Irlande) a fait défaut à ces négociations et dans la perspective de nouvelles négociations, l'analyste insiste sur ce point. Enfin, faisant référence aux propositions actuellement portées par l'avocat Brian Currin, Jean-Pierre Massias rappelle que deux précieuses questions restent en suspens : Le Pays Basque trouvera-t-il un médiateur aussi «médiatique» que ce fut le cas en Irlande ? La question d'une hiérarchie des tables de négociation avec une primauté donnée à la table politique est-elle possible ?

La paix est exactement inverse à un Western

Pour Jean-Pierre Massias, Professeur de droit public, Expert auditionné par le groupe de soutien au processus de paix au Pays Basque : «le conflit basque est un paradoxe incroyable. Même si on peut trouver des raisons à la poursuite du conflit, pris individuellement, les différents protagonistes ont quand même intérêt que le conflit s'arrête». Pourtant, le conflit est marqué par de multiples échecs. Pour le Professeur de droit, le dernier échec de 2006 est «basé sur des malentendus fondamentaux qui ont empêché la résolution du conflit». D'une part, le conflit basque est, selon lui, devenu «un instrument de la vie politique basque et espagnole où les protagonistes ont notamment des intérêts politiciens venant perturber les intérêts fondamentaux». D'autre part, la lutte armée «n'est qu'un moyen, non une fin en soi». De ce point de vue-là, il estime que «Zutik Euskal Herria peut être un bon instrument si on va au bout de sa logique qui est l'arrêt de la violence».

Pour Jean-Pierre Massias «la paix est exactement le contraire d'un western : c'est le premier qui rengaine qui a davantage de chances de gagner ! Car celui qui rengaine le premier met l'adversaire devant ses propres contradictions»...

 

http://www.lejpb.com/paperezkoa/20100415/194011/fr/Des-facteurs-exterieurs-a-table-Loyola-ont-fait-echouer-laccord

Publié dans Nazio garapena

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